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Newborn feet under a blanket

« Rien n’est plus lent que la véritable naissance d’un homme.« 
(Marguerite Yourcenar)

Je ne vous apprendrai rien en vous disant que nous vivons dans une société de consommation. A l’ère où l’éphémère tient la plus belle place, où tout se remplace, où rien ne dure. Même les couples qui défient le temps et les épreuves se font de plus en plus rares, tant la communication et la recherche d’authenticité ont cédé place à une certaine superficialité. Le transitoire, le temporaire et le précaire viennent donner l’illusion de mouvement, de vie et d’action. Comme une sorte de fuite en avant.

Mais si on se donnait juste quelques instants pour se recentrer, pour se poser les bonnes questions, et oser se confronter aux réponses que nous avons au plus profond de nous, nous saurions probablement mieux nous entourer. Mieux nous canaliser. Mieux choisir. Surtout, mieux nous connaître.

J’ai eu la chance d’avoir été éduquée par une mère aimante, patiente et totalement investie à l’écoute de ses enfants. Afin de mieux comprendre les rouages de la psyché humaine, elle entreprit des études alors que je n’étais encore qu’une petite fille, et devint psychologue, psychanalyste, et hypnothérapeute. Mais nos relations n’ont pas été simples, loin de là. Ma nature et mon fonctionnement spécifiques en ont été en grande partie la cause. Néanmoins, ma mère n’a jamais rien lâché. Elle me confrontait, plusieurs fois par jour, à mes ressentis, à ma propre compréhension du monde, à tout ce que mon imagination foisonnante et mon hypersensibilité m’amenaient à percevoir. Très vite, elle décela en moi un intense besoin d’expression sous toutes ses formes, qui était contrarié par une grande introversion. Le monde, et les gens en particulier, me faisaient peur. Je n’étais attirée que par les livres, et le calme. Elle m’encouragea alors à m’affirmer de toutes les façons possibles pour que je sorte de ma coquille : à écrire en tenant un journal intime, à jouer de la musique en me donnant des cours de guitare, à peindre, à dessiner, à faire de la danse…je me sentais enfin vivre à travers les vibrations que je percevais non seulement dans les sons, mais aussi dans les mots, dans les couleurs, dans les mouvements et dans toutes particules émotionnelles. Ma sensibilité s’exprima dans l’art et ne se fit plus subir, ma synesthésie pu s’épanouir pleinement. Pour ma petite sœur, la démarche fut encore différente, d’autant que ma mère dû prendre compte des effets que le parcours et la personnalité de l’aînée avaient laissés sur la cadette…mais là encore, elle s’adapta à ma soeur et respecta ses besoins.

Vous l’avez donc compris, ma mère n’a pas tenté de nous imposer d’être une autre que nous-mêmes, mais a, au contraire, tout tenté pour que notre nature puisse s’épanouir dans ce monde. Et c’est là, je pense, le véritable défi auquel sont confrontés les parents : ne pas voir en leur enfant leur double, leur objet ou leur œuvre, mais bien de leur donner tous les outils qui leur permettront de relever les défis de ce monde, en étant pleinement eux-mêmes.
La connaissance de soi est donc primordiale pour qu’un enfant puisse s’épanouir.
Cette connaissance de soi lui permettra d’accéder à la confiance en soi. La confiance en soi, c’est croire en sa capacité de réussir. Elle s’acquiert par l’expérience. Plus l’enfant sera encouragé, indépendant dans la réalisation de ses objectifs, et soutenu (qu’il réussisse, ou pas), plus il aura des bases solides, et confiance en lui.

L’estime de soi découle de la confiance en soi. Elle vient conforter la conscience en sa valeur personnelle, et demande d’accepter ses forces et ses faiblesses. Elle permet à l’enfant de comprendre qu’il a de la valeur, qu’il est digne d’être aimé et de se sentir assez en sécurité pour utiliser ses capacités et faire face aux défis de la vie ; même si tout ce qu’il fait n’est pas parfait.

De ces bases découleront alors d’autres capacités : l’estime et la confiance en soi permettent de donner le goût du travail bien fait, la résilience et un sens des responsabilités. Les responsabilités, elles, impliquent une cohérence dans les actions, un respect de la parole donnée et une honnêteté intellectuelle…c’est alors une pyramide de valeurs qui s’imbriqueront les unes aux autres dès l’instant que l’on respecte son enfant, qu’on applique nous-mêmes ces valeurs, et qu’on le valorise.

De mon côté, je garde en tête que mon enfant serait davantage sur cette Terre par ma volonté que par la sienne (même s’il paraît que les enfants choisissent leurs parents, mais c’est là un autre débat). Par conséquent, et avec le monde que nous avons aujourd’hui, avoir un enfant serait un pur acte égoïste – qui voudrait, sincèrement, offrir ce monde à son enfant ? – et ce, pour de multiples raisons : parce qu’un enfant serait le fruit d’un amour, parce que donner la vie est quelque chose de merveilleux, parce qu’il serait une forme de survie, parce qu’avoir un enfant nous fait grandir, parce qu’on voudrait un descendant qui récite le Kaddish à notre mort, parce qu’on a oublié la pilule, etc. Si on choisit de faire venir une âme sur cette Terre, une âme qui n’a de surcroit rien demandé, nous nous devons donc de la rendre la plus heureuse possible dans cette grande aventure qu’est la Vie.

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