A force de discussions et de réflexions avec une de mes amies et mes proches, mon honnêteté intellectuelle m’a poussée à approfondir la question. En ce qui me concerne, j’ai toujours volontairement coupé tous les ponts avec mes ex, car je trouvais malsain qu’ils puissent avoir un regard sur ma nouvelle vie ; et plus respectueux envers mon nouveau compagnon qui, lui, n’a pas demandé à se voir imposer dans sa vie un nouvel « ami » qui n’en sera jamais un.
Par cohérence, respect et honnêteté vis-à-vis de tous, j’ai donc pris part de fermer hermétiquement les portes de mon passé. Pour autant, je ne peux que constater que d’autres envisagent les relations avec leurs ex autrement. J’ai alors voulu comprendre : pourquoi tenir tant à conserver le lien ? Peut-on réellement croire cette amitié entre ex possible et sincère, dénuée de toute arrière-pensée ?
Plusieurs psychologues répondent à ces questions. Ce texte n’est donc pas le fruit de mes propres opinions, mais bien celui d’une étude.
La difficulté de croire que l’on n’existe plus pour l’autre
La première question qui se pose pour savoir si, oui ou non, c’est une bonne idée de transformer sa relation de couple en amitié après la rupture, c’est déjà de comprendre pourquoi cette idée a germé en nous. Pourquoi donc veut-on rester proche de son ex ?
Pour Camille Rochet, psychologue, la raison est intrinsèque à l’égo de l’humain : « On a généralement rien envie de perdre et beaucoup de mal à se dire que l’on n’existe plus dans le cœur et dans la vie de l’autre », explique-t-elle.
Elle poursuit : « On voudrait pouvoir rompre tout en gardant une place essentielle dans le cœur de l’autre. Car on n’aime pas se rendre compte qu’on a été remplacé, qu’on est moins précieux/se à ses yeux ou qu’il ne nous aime plus vraiment. On vit avec une drôle d’envie : que l’autre ait des regrets en pensant à nous, et qu’il garde un regard particulier sur la relation, même des années plus tard. »
Pour cette experte en relations de couple, l’amitié entre ex ne peut pas vraiment exister dès lors que le couple a partagé des sentiments profonds et une relation charnelle. « Pour moi, l’amitié avec quelqu’un pour qui on a eu de réels sentiments, c’est très compliqué, même physiologiquement. Le corps se souvient des sentiments forts et il est difficile, voire impossible, de passer outre ça. »
Cela implique que, dans bon nombre de cas, l’amitié est subie par l’un des deux ex qui vit dans l’espoir secret de voir la relation repartir de plus belle. Une situation compliquée aux conséquences souvent désastreuses.
« Pour la nouvelle personne, c’est également très compliqué d’accepter ce fantôme sentimental qui œuvre à faire perdurer un lien passé. Comment le nouveau compagnon peut-il se projeter entièrement alors qu’un autre est déjà positionné sur ses plates-bandes ? »
Et s’ils étaient amis avant ?
L’amitié solidifie un couple, mais ne le remplace pas. Pour la psychologue, on ne peut revenir en arrière, pour la même raison que précédemment : la mémoire physiologique. Les sentiments les plus forts prennent le dessus. L’amitié passée aura de toute façon été remplacée par de l’amour. Impossible donc de faire le chemin inverse et de faire (re)naître une réelle amitié entre deux ex.
« Mon ex est mon meilleur ami »
Pour le psychologue Yves-Alexandre Thalmann, auteur de « Gérer ses ex », il s’agit là d’ « homéopathie émotionnelle ». La facilité avec laquelle on fait des rencontres est inversement proportionnelle à la difficulté de se lier profondément, et de manière pérenne. L’ex est alors considéré comme un repère affectif, une sorte de « doudou » que l’on ne parviendrait pas à lâcher, car on aurait peur de l’inconnu sans lui.
« Je garde le contact car je suis possessif et j’espère, même si je ne le réalise pas »
Certains gardent le contact pour garder un droit de regard sur la façon dont leur ex mène sa vie, les choix qu’il/elle fait, et les nouvelles personnes qui entrent dans son existence. De cette manière, ils s’arrogent le droit de se comparer au nouveau compagnon ou à la nouvelle compagne et, de manière plus ou moins consciente, espèrent pouvoir le/la récupérer un jour. Selon la psychologue Isabelle Carlani « on a alors une possessivité qui n’a plus lieu d’être », « sous couvert de l’amitié, la tension sexuelle et le jeu de séduction perdurent. »
« Rompre, c’est faire un deuil. Or, pour qu’il soit efficace, le deuil doit être douloureux », surenchérit Yves-Alexandre Thalmann. L’Homme n’aimant pas souffrir, il préfère éviter le deuil, et ainsi donc garder le contact. « Car tourner complètement la page nécessite une coupure nette. Ce n’est qu’ainsi qu’on se confronte à soi-même et qu’on prend du recul sur sa relation passée. »
Une amitié possible si la page est réellement tournée
Qu’il n’y a donc plus ni rancœur, ni attirance, ni espoir…ni même mémoire ? « Le cerveau n’a pas la capacité de faire la transition immédiate entre une relation amoureuse, où on éprouve du désir pour la personne, et une relation amicale, où il n’y a aucun mot doux. », nous informe Lucie Mariotti, coach et auteure du livre « L’amour, le vrai ! Comment faire la rencontre de votre vie ». Le cerveau, aussi, ne peut pas oublier les instants amoureux passés et s’abstenir de les transposer sur la relation amicale présente. Il faut un certain espace de temps sans aucun contact pour passer d’un statut à l’autre « On a alors besoin d’un sas de décompression entre deux histoires qui sont bien distinctes. Une période où la séparation est franche et totale. Où les ex ne doivent pas s’appeler, ni discuter, ni prévoir des sorties ensemble. »
Il est donc primordial d’être complètement honnête avec soi-même et avec l’autre pour rester ami avec son ex. « Pour moi, il faut faire attention à sa façon de se positionner vis-à-vis de mon partenaire et de la copine ou compagne de mon ex. Si la relation amicale dérange l’un des deux, je préfère m’évincer. », conclut Lucie Mariotti.
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