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Beaucoup d’entre nous succombent à l’attachement, ce sentiment d’affection qui nous lie fortement à quelqu’un, à un animal ou à quelque chose. Ce sentiment peut rester stable ou muter pour aboutir à de l’amour, de l’amitié, en un souvenir, en une nostalgie du souvenir…voire même en tout cela successivement dans une phase de vie. Du moins, c’est ainsi que l’on définit communément « attachement ». Mais son sens est, en réalité, tout autre.

L’attachement est une relique de la petite enfance où le nourrisson devait créer et entretenir un lien vital avec sa mère pour survivre. La façon dont ce lien a été créé est fondamental car il a déterminé la façon dont l’adulte se nourrira dans ses besoins fondamentaux et trouvera son équilibre psychique. La qualité de l’attachement entre la mère et l’enfant conditionne donc inconsciemment la sensation de sécurité de l’adulte et de confiance en lui-même. S’il fait défaut ou n’est pas optimal, il mènera à l’angoisse de séparation ou d’abandon ainsi qu’à divers troubles psychologiques : les troubles alimentaires (anorexie, boulimie), les conduites addictives (toxicomanie, alcoolisme, jeu, internet, réseaux sociaux, etc.), les troubles de l’humeur, les troubles anxieux, ou les troubles limites de la personnalité sous forme de troubles fonctionnels dissociatifs (dépersonnalisation, troubles de mémoire, pensée désorganisée, impulsivité mal contrôlée).

Attention : toutes les conduites addictives de l’adulte ne signifient pas forcément un déficit du lien d’attachement lorsqu’il était nourrisson ; mais ce déficit conduit à une conduite addictive et à au moins deux des phénomènes énumérés plus haut.

En fonction de l’attitude maternelle à son égard, l’enfant garde donc un modèle d’attachement qu’il intériorise et dont il se servira ultérieurement au cours de sa vie d’adulte dans toutes ses relations sociales et intimes. Mais on peut en décider autrement.

Je persiste à penser qu’une véritable liberté d’Etre et de Penser passe par la résilience de la douleur de la rupture du lien maternel ou de tout lien d’attachement de substitution créé à la prime enfance. Parce que si l’attachement du nourrisson est indispensable à sa survie, l’attachement de l’adulte est pathologique.

« Attachement » vient de « Estacher » qui signifie « assujettir ». Il ramène à la convoitise et est le corollaire de l’envie égocentrique. L’envie est le centre de l’attachement. Contrairement au désir, l’envie est anxiogène et est toujours accompagnée de force et de tension. Une pression vient constamment la raviver, elle a besoin de son objet pour satisfaire un vide narcissique immense et insatiable. Son objet est alors confronté en permanence à ses exigences toujours plus grandes, plus fortes et plus étouffantes. L’envie inflige, pour les deux protagonistes, une souffrance nouée de frustration, de colère et d’incompréhension mutuelles.

L’attachement consiste alors à vouloir que l’autre soit quelqu’un d’autre, pour qu’il se conforme coûte que coûte à un idéal. Il amène à vouloir pour l’autre, à penser pour l’autre, à orienter les choses, à prétexter l’amour, à le conditionner, à ne pas vouloir le perdre et à s’attendre qu’il dure éternellement. Des efforts monumentaux sont déployés pour changer le présent afin que la situation devienne ce qu’on veut qu’elle soit. Expression hystérique du refus que les choses soient différentes de la façon dont on les a imaginées, il est la manifestation la plus forte de l’intolérance à la frustration. Il y a attachement lorsqu’il y a intérêt personnel, égocentrisme, anxiété, excès, et ignorance totale de l’Autre dans son identité propre.

On confond souvent amour (vers l’Autre) et attachement (vers soi). Dans les relations, l’attachement vient contaminer l’amour. Il mène à la possessivité, à la perversité (plaisir inconscient de nuire) et à la jalousie (crainte obsédante d’être trahi(e)). Ces personnes sont comme des aspirateurs d’énergie. Elles viennent, avec plus ou moins de subtilité, envahir notre espace pour aspirer notre énergie, et créer un lien, par tous moyens, pour mieux annihiler l’Autre et l’assujettir. L’erreur serait de vouloir les aider en restant dans leur sphère et en acceptant la culpabilisation (sentiment de culpabilité pour une faute que l’on croit avoir commise). Accepter cet attachement a pour conséquence directe la perte de liberté, puis la perte de soi.

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