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« Pourquoi et comment les êtres se rencontrent et se ratent, se trouvent et se perdent, se désirent et se rejettent, s’aiment avant de se mépriser…pourquoi ne parvenons-nous jamais à nous détacher entièrement de ce que nous avons vécu, et surtout de ce que nous nous sommes infligés à nous-mêmes ? » ( Douglas Kennedy )

Si seulement je savais…cette question, d’une de mes plus proches amies, et retrouvée dans cette belle formulation de Douglas Kennedy, m’a laissée interdite. Peut-être devrions-nous adopter une philosophie de vie qui nous sauvegarderait de ces maux, faite d’optimisme et d’humilité. Peut-être, au fond, que la vie nous a ainsi protégé, contre notre gré, d’un tourment qui nous aurait laissé une cicatrice indélébile. Peut-être qu’en regardant devant soi, en apprenant à éviter ce genre de question, on en serait plus heureux. Les « peut-être » servent à anesthésier, peut-être que nous ne les utilisons pas assez.

Quelque part, les êtres qui marquent sont ceux qui nous changent, qui nous révèlent à nous-mêmes et nous orientent. Ces êtres sont ceux dont les vibrations ont vibré avec les nôtres pour les rendre plus intenses, comme s’ils avaient touché une corde sensible pour en faire émettre un son d’une pureté inédite. Les déchirements, les affres et les tourments ne sont alors que la réciproque : autant la relation fut intense dans un sens, autant elle le sera dans l’autre. Et, si certains méprisent, d’autres tournent juste des pages. Ce que l’on interprète comme « mépris » ne l’est alors pas forcément. La vie doit continuer.

N’accordons aussi pas à l’amour toutes les folies et les déraisons. Non, l’amour ne rend ni sourd, ni aveugle, ni stupide. Bien au contraire. L’amour nous éveille, nous apprend et nous fait nous surpasser. C’est parce que nous avons peur d’être déçu, peur de souffrir et de devoir affronter l’échec que nous nous aveuglons. Mais nous nous aveuglons tout seul, et c’est bien la peur qui nous aveugle, pas l’amour.

Cette peur…nous la sous-estimons malheureusement trop souvent. Si les êtres se rencontrent et se ratent, s’il se retrouvent et se perdent, c’est davantage par peur d’oser être heureux que par un coup du destin. Combien de décisions cruciales n’avons-nous pas prises ; combien de mots n’avons-nous pas prononcés ; combien de gestes n’avons-nous pas esquissés uniquement par peur de ne pouvoir assumer leurs conséquences ? Sommes-nous donc si fragiles pour que notre cœur ne puisse pas supporter le choc du bonheur ?

Plus j’avance, et plus je réalise que les plus beaux destins sont ceux qui ont été arrachés à la force du poignet, ils ne sont jamais offerts. C’est d’ailleurs ainsi qu’ils acquièrent toute leur valeur. Mais il suffit d’un rien pour que tout bascule. Juste un mot pour que le chemin soit irréversible. Le virage reste celui de la lucidité et du courage de se permettre d’être heureux. Indépendamment du regard des autres, du temps qui passe ou du poids du passé. Pour que demain ne soit ni un gâchis, ni une fatalité.

Laissons nous aussi la possibilité de nous pardonner. Ce que nous nous sommes infligés à nous-mêmes, ce sont d’abord nos névroses, traduites par nos choix, nos renoncement et nos résignations. Nous pardonner nous permet de mieux nous trouver, en nous libérant de ces enclaves, en nous rappelant que rien n’est jamais trop tard. Notre vécu fait partie de nous, quoi qu’on y fasse, alors apprenons à vivre avec au mieux possible, pour ensuite en faire une force, car c’est justement notre vécu qui nous a fait tels que nous sommes aujourd’hui. Nous savons que, désormais, nos pas seront plus assurés, même si les voies qu’ils empruntent ne seront jamais totalement sures. Les êtres s’attachent et se détachent selon la connexion de leurs vibrations et leur vitesse d’évolution ; rien ne se défait sans que quelque chose, quelque part, ne se crée. Lâchons-prise et regardons devant nous.

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