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2 août 2014. Le jour de mes 29 ans, j’ai ressenti cette émotion troublante que je ressens encore aujourd’hui, un peu plus de 3 ans plus tard.

C’est maintenant la nuit de Kippour, je n’ai normalement même pas le droit d’écrire… Mais écrire est mon besoin, mon essence, aujourd’hui plus que jamais.  J’aurais voulu à nouveau être près de l’eau à la naissance du soleil au creux de l’horizon, humer l’air salé qui pique au nez et aux yeux, écouter le bruit des vagues et des mouettes, sentir le sable froid et les vagues revigorantes qui me ramènent à la vie. Besoin de partir loin. Parfois se retourner rappelle le chemin parcouru et nous fait dire que, finalement, nous sommes probablement plus forts que nous l’aurions cru, et que nous avons énormément changé. Et l’immensité de la mer, de la nature, de l’univers nous rappelle que nous ne sommes rien, mais que rien ne vaut la vie.

 »

29

J’ai oublié de dormir, cette nuit. Les bras de Morphée ne semblaient pas m’attirer. Couchée à deux heures, levée à quatre. Mes pas m’ont portée jusqu’au balcon, je me suis laissée choir sur la première chaise à ma portée et, telle une statue, n’ai plus bougé. Pendant environ deux heures. Le temps que le soleil s’éveille.

Quand j’étais petite, je dormais très peu. Ce n’est que lorsque j’ai lu quelque part que l’organisme humain avait besoin en moyenne de huit heures de sommeil que je me suis formatée à dormir davantage. Puis, chemin faisant, j’ai pris goût au sommeil. J’ai fini par y trouver un moyen de me ressourcer et de m’extirper du réel pour plonger dans un endroit qui n’appartient qu’à moi. M’enfoncer dans l’abîme de l’oubli.
Mais là, j’ai oublié d’oublier.

Le soleil s’étire et s’étend. Il commence à bâiller sur les toits des maisons qui jouxtent la mer. Je me lève et m’étire à mon tour, prends un papier et un crayon, griffonne quelques mots et descends en prenant soin de ne pas claquer la porte derrière moi. Je dévale les escaliers, courrant presque.
Le sable froid rappelle à mes pieds nus l’heure matinale, je me risque à avancer jusqu’à l’eau. Elle est refrigérante. Chaque vague m’électrise, je ferme les yeux et hume l’air salé. A ma droite, j’entends quelques mouettes qui revendiquent leur territoire.

Autant j’aime fêter l’anniversaire des autres parce qu’il me rappelle qu’ils sont vivants, autant je n’aime pas fêter mon propre anniversaire parce qu’il me rappelle que je suis mortelle.

Je ne sais pas pourquoi mais, tous les ans, le même jour, j’ai cette sensation étrange qu’un miracle s’est produit. Comme si je n’aurais pas dû fêter cette année de plus ; comme si, au fond, je n’y croyais pas vraiment. Pourtant tout va bien. Objectivement, j’ai la santé et tout pour me projeter dans un avenir confiant et serein. Alors je ne comprends pas ce noeud qui me serre le coeur et l’estomac. 

Mon ventre semble répondre à l’appel de mes pensées en gargouillant bruyamment : il a faim. Et bien, il attendra.

Souvent, dans mes rêves la nuit, mon corps est léger comme une brise, si léger qu’il devient transparent et se fond dans le vent. Et il s’élève au dessus de tout. Et plus rien n’a d’importance.

Une sorte de grosse éponge baveuse me lave la joue droite, je rouspète en lançant un coup de poing en sa direction. J’entends un petit couinement, et rouvre les yeux. Je me rends alors compte que je m’étais endormie sur le sable, et qu’un chien venait de me réveiller à sa manière.
« Hummm…Désolée, mon vieux. »
Et je me relève et déguerpis en vitesse, craignant qu’il ne me manifeste davantage son affection.
Allez, happy birthday. »

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